Pour un deuxième article, je dois tout vous dire… j’ai grave la pression. Bah oui : autant, pour le premier article, je suis plutôt à l’aise, j’explique pourquoi je fais un blog, puis, dans le même temps, ça sert à voir si ce que j’écrit ça rend plutôt joli dans le thème (et je peux vous dire que ça m’a bien pris du temps de le traduire entièrement en français !), autant, là, il faut trouver quelque chose d’autre que de parler de son blog (bordel, cette phrase de 32 kilomètres). J’ai bien quelques sujets ici et là, matérialisés sur le carnet, qui attendent leur tour, et j’allais justement en choisir un, mais, contre toute attente, j’en ai un autre qui est arrivé tout frais dans ma tête ce matin et je vais vous en parler incessamment sous peu, enfin, disons-le, tout de suite maintenant en instantané.
Parfois, on dit, ou on s’entend dire, la phrase suivante :
Va t’acheter une personnalité !
Allez, vous l’avez tous déjà dit ou, au moins, vous l’avez tous déjà entendu ! Allez, avouez ! Hein ? Qui a dit non dans le public ? Allez, qu’il lève la main, il ne lui arrivera rien… *voit une main qui se lève* *lui tire dessus avec un fusil à pompe*. Comme je le disais, donc, vous l’avez tous déjà entendu. *pose son fusil à pompe à côté de lui en le caressant doucement comme un précieux ami*
Mais pourquoi on dit ça ? Je vais vous expli-
– Bah enfin Enrím c’est évident ! Si je prends une quatre fromages à la pizzeria de Joinville-le-Pont et que mon pote prend la même, je vais lui dire qu’il faut qu’il aille s’acheter une personnalité parce qu’il a pris la même que moi et… *se fait tirer dessus sans sommation*
Il est fou de parler à ma place celui-là ! Il a cru qu’il était l’auteur de ce blog ?! Le prochain que je prends à refaire la même chose je passe à mon précieux katana offert par un ami moine sur les Montagnes Sacrées de l’Est et, croyez moi fort bien, je vais prendre mon temps à le faire souffrir… non mais !
Je disais donc *prend un temps de silence pour bien regarder le public en lançant un regard froid*, on dit Va t’acheter une personnalité ! quand on voit quelqu’un d’autre faire la même chose. Effectivement, si je vois François-Xavier commander une quatre fromages, alors que j’en ai commandé également une juste avant, je pourrais me dire qu’il n’a pas pris le temps de regarder toute la carte, qu’il n’a pas précieusement sélectionné la pizza qu’il souhaitait selon ses goûts et ses préférences, qu’il a eu la flemme, et que, par mimétisme, il m’a tout bonnement suivi. Ou peut-être que lui aussi il adore la quatre fromages et que je suis complètement dans le faux. Le doute est permis dans cette situation.
Mais bon, dans un tout autre exemple à peine exagéré, si François-Xavier devait s’acquérir d’un appartement tout juste après l’achat du mien, et que son logement devait se retrouver dans la même rue, dans le même immeuble et au même étage que moi, et qu’en plus son chez-lui devait être composé des mêmes meubles que les miens, avec en plus les mêmes décorations dont un tableau reprenant la phrase culte “Vous savez, moi je ne crois pas qu’il y ait de bonne ou de mauvaise situation. Moi, si je devais résumer ma vie aujourd’hui avec vous, je dirais que c’est d’abord des rencontres. Des gens qui m’ont tendu la main, peut-être à un moment où je ne pouvais pas, où j’étais seul chez moi. Et c’est assez curieux de se dire que les hasards, les rencontres forgent une destinée… Parce que quand on a le goût de la chose, quand on a le goût de la chose bien faite, le beau geste, parfois on ne trouve pas l’interlocuteur en face je dirais, le miroir qui vous aide à avancer. Alors ça n’est pas mon cas, comme je disais là, puisque moi au contraire, j’ai pu ; et je dis merci à la vie, je lui dis merci, je chante la vie, je danse la vie… je ne suis qu’amour ! Et finalement, quand des gens me disent « Mais comment fais-tu pour avoir cette humanité ? », je leur réponds très simplement que c’est ce goût de l’amour, ce goût donc qui m’a poussé aujourd’hui à entreprendre une construction mécanique… mais demain qui sait ? Peut-être simplement à me mettre au service de la communauté, à faire le don, le don de soi” hé bien je pourrais lui déclarer, de manière très certaine, qu’il faut absolument qu’il aille s’acheter une personnalité. Et, dans le même temps, j’irais acheter un système de sécurité premium deluxe car j’aurais un peu beaucoup peur de François-Xavier comme voisin.
Mais, là où je veux en venir, c’est pourquoi on dit S’ACHETER une personnalité ? On devrait dire CONSTRUIRE une personnalité. Si chacun est appelé à devenir une personnalité unique et précieuse, parce que dans notre société, on nous fait croire qu’on est tous merveilleux et des originaux exceptionnels (mais bon en réalité ça ne concerne que moi on le sait), on se doute bien qu’une personnalité s’acquiert par le temps, les expériences, les réussites, les erreurs, les émotions, les amours, les deuils, les pensées, les éducations, les traditions, les activités, et que sais-je encore, mais en aucun par l’argent. Alors pourquoi, bordel de merde, tout le monde dit ACHETER hein pourquoi ??! J’ai enquêté pour vous ! *lancement de jingle d’une émission connue sur Aime SauSix*
Drogue, prostitution, violence… les dessous cachés de ce marché noir inconnu du public.
Je me suis dit, que, forcément, si tout le monde dit Va t’acheter une personnalité c’est, que, forcément, il existe une vérité bien tapissée au fin fond de cette sombre phrase. Alors, j’ai fait ce que ce beaucoup de personnes font de trop, surtout sur le Touitteur, et ce qu’on devrait jamais faire, j’ai appliqué la phrase au premier degré (attention, cette action a été réalisée par un professionnel, n’essayez surtout pas de la reproduire chez vous).
Alors, j’ai été à la pizzeria de Joinville-le-Pont avec François-Xavier (je suis sûr que vous l’imaginez grand et pâle avec des lunettes, tout coincé, et vous n’auriez pas tort), et j’ai attendu qu’il choisisse sa pizza. Il a demandé une quatre fromages (contre toute attente). La, j’ai moi-même demandé une quatre fromages ! Et paf, je ne me suis pas fait prié, j’ai entendu tout de suite François-Xavier me lancer Hé, Enrím, va t’acheter une personnalité !
C’est bon, l’opération était lancée.
Ni une, ni deux, je m’en vais aussitôt de la pizzeria devant le regard médusé de François-Xavier qui n’a pas compris pourquoi je me suis barré et qu’il allait devoir manger une huit fromages. Et, parcourant le centre-ville, j’ai cherché à savoir ce qui avait changé. Car, dès que François-Xavier a lancé sa phrase magique, j’ai ressenti des picotements. Alors non, pas ce genre de picotements qui t’obligent honteusement à aller voir le médecin, mais une sorte d’électricité au bout des doigts. Je savais au fond de moi qu’il y avait quelque chose de différent. Quelque chose s’était produit et je devais savoir quoi.
Et alors, dans le centre-ville de Joinville-le-Pont, ne voilà-t-il pas que je vis un immeuble, coincé entre deux autres, qu’il me semblait n’avoir jamais vu avant ? Ha bah j’en suis sûr parce sur la façade il y avait écrit Personn’Achats. Alors, prenant mon courage à deux mains, je suis rentré dans cette boutique qui n’apparait que lorsque l’on te dit Va t’acheter une personnalité.
Dedans, il n’y a étonnement qu’une grande pièce vide avec plein de miroirs. Je tombe soudain sur une vielle dame qui a failli me provoquer une crise cardiaque. Elle semblait tout à fait quelconque, toute petite, avec des lunettes en demi-lune, et, pourtant, lorsqu’elle s’est mise à me parler, j’ai senti en elle un trait de caractère rare :
– Bonjour, bienvenue à Personn’Achats ! Ici, donnez vos sous et on vous donnera un vous ! Alors, je suppose que quelqu’un va vous à dit d’aller vous acheter une personnalité parce que vous avez agit tout comme elle ?
– Heu… oui tout à fait.
– Alors ne perdons pas de temps ! Mettez-vous en face ici !
Elle me désigna un miroir.
D’abord hésitant, je le fis.
Je ne vis alors que mon propre reflet (plutôt beau gosse, enfin, comme d’hab). Voyant qu’il ne se passait rien au bout de dix secondes, j’allais lui demander ce que je faisais posé comme ça comme un con lorsque, soudain, je me vis agir dans le miroir !
J’avais grave de l’assurance et je savais exactement ce que je voulais ! Paf, je prends ce tee-shirts ! Paf, je tourne à gauche ! Paf, je vais en Grèce l’année prochaine ! Je n’avais aucun doute, aucune hésitation.
– C’est la personnalité que l’on vend le mieux ! lança fièrement la vendeuse. Avec TOUTENCONFIANCE, vous êtes sûr de ne plus jamais entendre la fameuse phrase !
– Ha heu logique… dis-je. Mais, dites-moi… je n’arrive pas à savoir ce que vous pouvez bien vendre d’autres comme personnalité puisque dès lors qu’on sait exactement ce qu’on veut, on a résolu le problème, non ?
– Ha mais c’est là que vous vous trompez mon beau monsieur ! Il existe bien d’autres vous pour vous évitez cette réplique fâcheuse. Tenez, par exemple, ce miroir là !
Elle me prit la main et m’emmena de force devant la glace.
Après un petit instant, je me vis méchant et complétement renfermé.
– Alors, que voyez-vous ?
– Bah je fais la gueule…
– Exactement ! Avec MEFAITPASCHIER, même si vous deviez faire exactement la même chose que votre interlocuteur, vous êtes certain qu’il n’osera pas vous dire d’aller acheter une personnalité !
– Ha ouais, pas con. Vous avez quoi d’autres ?
– On a MYSTÈREETBOULEDEGOMME, avec cette offre, vous serez si énigmatique que vous déconcerterez votre entourage qui n’osera pas savoir si vous avez simplement copié ou si vous c’est le résultat d’une pensée complexe dépassant l’entendement humain.
– Ha oui, c’est plus technique.
– Mais tellement satisfaisant quand on la maitrise bien ! Je la conseille pas forcément en premier achat, ça peut louper.
– Hé bien écoutez madame, je vous remercie pour le temps que vous m’avez consacré mais je pense que je n’achèterai rien aujourd’hui et que je vais y réfléchir…
– Oh, pas de regret vraiment ? Vous risquez pourtant de subir de nouveau la remarque qui est tout le sujet du présent article de blog !
– J’en prends le risque.
– Très bien, bonne journée monsieur.
– Et bonne journée à vous madame.
– Merci.
– De rien.
– Pas de quoi.
– A bientôt.
– Oui, à bientôt.
– Au revoir, donc.
– Oui, au revoir.
– Heu on va arrêter car je sens que nous sommes piégés dans une boucle de politesses inutiles.
– Ouf, merci, je n’osais pas le dire… d’autant qu’on ne sait plus qui dit quoi.
– Au revoir, donc.
– STOOOP !
Et là, je me suis enfui de la boutique pour retrouver aussitôt François-Xavier à la pizzéria. Je me suis alors mis à le frapper.
– Hé mais pourquoi tu me frappes ? Tu pars sans rien dire, tu reviens et maintenant ça ??!
– Parce que tu as mangé ma quatre fromages.
– Bah tu n’as qu’à en commander une autre.
– Non, j’ai de la personnalité moi ! Monsieur, monsieur… oui vous… je voudrais une calzone.
Et voilà que tout est bien qui finit bien. Moralité : si vous voyez quelqu’un faire la même chose que vous, ne lui dîtes pas d’aller acheter une personnalité mais d’aller construire une personnalité. Cela lui évitera de dépenser des sous.
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